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Cirque / Michele Bokanowski, comp.
Musique audio
Le cirque est un lieu de lumières et de couleurs, mais aussi d’ombres, voire de ténèbres. Certes, il enchante les enfants et fait rire les adultes. Mais il suffit de passer un soir d’automne pluvieux à proximité d’un chapiteau et de sentir l’odeur du fourrage pour songer à la tristesse des clowns, au dressage interminable des animaux et aux freaks qui sont cachés dans une quelconque roulotte … Au cinéma, l’essence du cirque ؘ– mouvement, lumière, danger et burlesque – aura été admirablement rendue dans les Notes on the Circus de Jonas Mekas (1966), un des inventeurs du journal intime filmé. Avec Cirque, Michèle Bokanowski fait un travail similaire, entièrement dévolu au tournoiement, dans le domaine musical. Elle s’est notamment illustrée dans la composition de musique concrète, entre autres Tabou et Trois chambres d’inquiétude, après avoir étudié auprès de Pierre Schaeffer et d’Éliane Radigue. Cette dernière grande dame du drone et du minimalisme, est tombée sous le charme de Cirque et a écrit le livret de la pièce sous la forme d’un poème. En voici un extrait : « Étonnant parcours de vie auquel nous invite Michèle Bokanowski sur la piste de Cirque. Galop du temps, tourne, tourne et disparaît dans les coulisses du réel, seule apparente ouverture du cercle tracé, genèse. Enfance emportée dans la clameur et les rires d’une entêtante ivresse de vie, suspendue au fil de sa dérisoire précarité. En filigrane apparaît obsédant, ricanant dans sa toute puissance, le destin, toujours proche du drame. Éphémère victoire. » La composition, divisée en cinq mouvements, repose sur la manipulation et le montage d’enregistrement captés ay sein d’un ou de plusieurs cirques (cela n’est pas précisé et n’a aucune importance) entre 1988 et 1993. L’allegro initial expose le galop d’un cheval, rejoint peu à peu par d’autres évocations. D’emblée, l’idée de l’espace circulaire du chapiteau est magnifiquement rendue et sera constamment rappelée par un usage inisitant de la technique de la boucle. Rires d’enfants, applaudissements et roulements de tambour sont ainsi cisaillés, répétés avant d’être interrompus brutalement. Des intermèdes d’accordéon et la déformation des sons induisent une ambiance onirique. Ce délicieux cauchemar qu’offre Michèle Bokanowski est une évocation belle et nostalgique, toujours citer Éliane Radigue de la « Magie de l’enfance toujours présente au cœur de l’homme au-delà même de son abrupte fin. » Alexandre Galand_Field Recording. L’usage du monde en 100 albums. Le mot et le reste.2012
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