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Wind [Patagonia] / Francisco Lopez, enr., comp.
Musique audio
Edité par and/OAR , 2007
« Voici les bords d’une étendue morne et inhospitalière. Il y court le vent le plus rapide du globe. Il apporte du pôle comme mille et mille flèches de glace qui percent toute protection et fondent cruellement dans les veines et les os, là où semble couver la chaleur de la vie. » Roger Caillois, Patagonie. Le célèbre vent fouettant les étendues désolées de Patagonie fait l’objet de ce magnifique disque de Francisco Lopez. Une seule longue plage offre à l’auditeur un montage de différents vents captés dans le sud de l’Argentine. Leur puissance d’évocation dépend avant tout de leurs propriétés musicales, en dehors de tout symbolisme. Ils forment en effet une matière sonore enveloppante, toute en drones grondants et variations aléatoires. Pour les apprécier, nul besoin d’identifier la source originelle des sons. Par ailleurs, et comme nombre de phénomènes naturels spectaculaires, ils évoquent quelque chose d’incompréhensible, de presque terrible. Leur capacité à fasciner est également due au sentiment de solitude qu’ils évoquent lorsque l’on pense à l’immensité, souvent vide er décharnée, parcourue par leurs souffles. Le texte « The sublime and the Sonic Life of Nature » du philosophe Christoph Cox (intégré au livret accompagnant le disque) éclaire la portée esthétique de la démarche de Francisco Lopez. Le disque Wind ferait référence à la tradition ancienne des harpes et flûtes éoliennes, instruments qui domestiques, humanisent et rendent le vent musical. Cependant le projet de Lopez, en insistant sur l’intensité et l’impact du vent lui-même, s’intéresse plus à sa force élémentaire et à sa puissance non humaine, c’est-à-dire la distinction entre le « beau » et le « sublime », a été théorisée dès le XVIII siècle, notamment par Edmund Burke et Emmanuel Kant. Le beau offrirait un plaisir positif, un agrément esthétique résidant dans des formes et couleurs qui sont déterminées, harmonieuses et qui sont conçues dans le cadre de l’imagination humaine. Le sublime par contre procurerait un plaisir ambigu, mêlé à la douleur et à la tension résultant de l’indétermination de formes excédant la compréhension humaine. La notion de sublime, d’après Burke et Kant, s’appliquerait dès lors parfaitement à la puissance des tempêtes, volcans et autres montagnes. D’après Christoph Cox, et force est de tomber d’accord avec lui, les vents patagons de Lopez partageraient cette beauté féroce et cette immensité. Alexandre Galand_Field Recording. L’usage du monde en 100 albums. Le mot et le reste.2012
"Wind [patagonia]" se veut le dernier volet de la trilogie des Amériques après "La Selva" (jungle du Costa Rica) et "Buildings" (les immeubles de New York), la Patagonie et ses vents. Comme BJ Nilsen ou Chris Watson, Francisco López s'attaque au vent, d'apparence insaisissable et pourtant ici fixé. Là aussi, l'idée est d'utiliser des enregistrements sans transformations, ni mixages. Calme profond et violentes éruptions enregistrées durant l'hiver les années 2000 et 2003. Une mystique du sonore, une écologie, visant l'écoute transcendantale. (Metamkine)
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